vendredi 25 mars 2011

Au Moment de la Nuit - Actuellement au Studio des Champs-Elysées

Nicolas Briançon (metteur en scène d'une très réussie "Nuit des Rois" en 2009), dirige et joue en compagnie de la belle Anne Charrier deux textes consacrés aux intermittences du coeur.

Dans le premier tiré de "La nuit et le moment", les costumes branchés des comédiens (créés pourtant par le talentueux Michel Dussarat) qui sont en complet décalage, on goute pleinement le délicieux, l'irrésistible texte de Crébillon fils.

Le libertinage le plus débridé y est évoqué avec un goût exquis, et de si délicates descriptions que l'on est emporté dans un tourbillon de débauche avec une élégance parfaitement maîtrisée que vient encore souligner un déluge d'imparfaits du subjonctif employés avec un naturel déconcertant. Les personnages sont beaux, futiles, mais surtout attentifs à travestir leurs blessures et à ne pas se livrer. Jamais ils ne laissent parler leur coeur.
De cette joute amoureuse dont on s'enivre, il ne restera au lever du jour qu'une mélancolique et fatale désillusion.

Pour "le Pain de Ménage" de Jules Renard, décor et costumes sont plus adaptés au texte et les interprètes parfaits dans leur rôle respectif.

Les personnages cette fois sont à l'opposé de nos protagonistes libertins. Nous sommes un siècle plus tard, il faut le dire, et la bourgeoisie bien pensante à son apogée. Cependant l'homme et la femme se veulent des conjoints respectivement comblés de bonheur et l'on assiste à une surenchère d'éloges échangés à propos de chacun des absents.

Ces unions paradisiaques paraissent inattaquables jusqu'à ce que....la tentation de "l'autre" ne se fasse jour. La lézarde devient gouffre et c'est bientôt un nouveau paradis qui sera évoqué: celui qui prodigue la joie de l'ailleurs, le goût du divers, l'excitation de la fuite.

Mais cette brûlure n'est qu'un feu de paille si tôt éteint, et nos héros bientôt de retour dans le droit chemin. Sens du devoir, conformisme moral? Ils auront cependant connu un intense plaisir éphémère: celui du rêve.

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