vendredi 14 octobre 2011

L'Homme Inutile de Iouri Olecha mise en scène de Bernard Sobel

Vous ne connaissez pas Youri Olecha?

Rassurez-vous, moi non plu, en dépit de mon attirance pour de nombreux auteurs russes: Boulgakov, Babel, Pilniak, Agnéev et Yakov Braun, ses contemporains.

Voilà tout le talent et le mérite de Daniel Sobel: avoir ressuscité cet écrivain prophétique né à la charnière du XXème siècle, en 1899, et mort en 1960 dans le plus grand dénuement et dans l'oubli parce qu'interdit après avoir connu la notoriété avec ses premiers écrits.

"L'Homme Inutile". Pièce visionnaire qui annonce en 1928 notre époque, avec une lucidité prémonitoire sidérante. "L'Homme Inutile" ou comment sauver l'humanité face à l'implacable règne du matérialisme.

Rien de didactique ici, moins encore de démonstration pédagogique; mais une parabole foutraque mettant en scène deux frères que tout oppose.
L'un respecté et soutenu par les autorités pour son engagement sans réserve dans la recherche du progrès social et la libération de l'homme, inventeur d'une découverte fondamentale: le saucisson à 25 Kopecks pour tous, moyen infaillible pour atteindre le but suprême: l'Avenir Radieux.
L'autre, fol, roi déchu, clochard superbe et ivrogne, est l'incarnation de l'Homme Inutile.

Entre eux deux autre personnages, enjeu du drame qui se noue: une délicieuse jeune fille, objet de toutes les rivalités, et un jeune poète maudit, protégé du savant mais également fou amoureux de la jeune personne.

Tout cela finira mal, tragiquement, par la mort du poète, l'avènement triomphal du saucisson face à l'écrasement du complot des sentiments fomenté par l'autre frère, qui aura tenté par tous les moyens de les faire se soulever dans un ultime soubresaut contre-révolutionnaire.

Certes le spectacle dure deux heures quarante... le texte n'est pas exempt de quelques longueurs et digressions parfois bavardes, mais son essence même, l'idée de l'auteur: la transposition du sujet sur le mode burlesque, en font un spectacle baroque et passionnant. La beauté des décors de Lucio Fanti dans un style entre expressionnisme et modernisme épuré, le jeu étonnant de John Arnold grandiose (Ivan le vagabond) face à Pascal Bongard (Andreï, l'homme nouveau) font aussi oublier quelques erreurs de distribution.

Le spectacle a pris fin le 8 octobre, je vous en ai parlé pour vous donner envie de lire Iouri Olecha
Voilà vraiment un auteur à REdécouvrir:
"Le Livre des Adieux" édition du Rocher 2006
"L'Envie" chez Point Seuil
"Les Trois Gros" à L'Age d'Homme

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