Retrouver ici les avis et points de vue d'une fine plume de la critique théâtrale parisienne...
vendredi 28 octobre 2011
dimanche 16 octobre 2011
L'augmentation de Georges Perec au théâtre du Rond-Point jusqu'au 6 novembre
Par respect pour la mémoire de Georges Perec je ne m'étendrai pas sur "L'Augmentation".
On est à l'opposé de toute la poésie et du charme irrésistible qui émanaient de l'inoubliable "Je Me Souviens" avec Sami Frey.
Ici l'hyperréalisme triomphe. Les interminables gesticulations et déclamations des comédiens, outrancières dans tous les registres sans exception, écrasent et réduisent à néant les subtilités du texte et le talent de Perec.
La metteur en scène, Anne-Laure Liégeois, accomplit ici le travail d'un éléphant dans un magasin de porcelaine.
Il n'en ressort qu'un spectacle terriblement daté, ennuyeux au-delà du supportable et qui semble interminable en dépit de sa courte durée.
Loin du registre affiché du "Rire en résistance" c'est d'un comique troupier archaïque dont il s'agit.
Dire que j'avais tant de regret de n'avoir pu obtenir des places pour "Debrayage", je l'ai échappé belle !
On est à l'opposé de toute la poésie et du charme irrésistible qui émanaient de l'inoubliable "Je Me Souviens" avec Sami Frey.
Ici l'hyperréalisme triomphe. Les interminables gesticulations et déclamations des comédiens, outrancières dans tous les registres sans exception, écrasent et réduisent à néant les subtilités du texte et le talent de Perec.
La metteur en scène, Anne-Laure Liégeois, accomplit ici le travail d'un éléphant dans un magasin de porcelaine.
Il n'en ressort qu'un spectacle terriblement daté, ennuyeux au-delà du supportable et qui semble interminable en dépit de sa courte durée.
Loin du registre affiché du "Rire en résistance" c'est d'un comique troupier archaïque dont il s'agit.
Dire que j'avais tant de regret de n'avoir pu obtenir des places pour "Debrayage", je l'ai échappé belle !
vendredi 14 octobre 2011
Gaspard Proust au Théâtre du Rond-Point
Vous connaissez tous Gaspard Proust.
On ne fait pas ici dans la confidentialité.
Le spectacle se joue à guichet fermé dans la grande salle Renaud-Barrault.
Les échos se multiplient de toutes parts sur les ondes et dans la presse.
Ma curiosité n'était pas moins dénuée de mes réticences habituelles pour le genre "one man show" d'humoriste trop souvent gras et lourd.
Mais divine surprise notre élégant jeune homme fait dans le politiquement incorrect de rigueur, le transgressif généralisé, la provocation cultivée, l'humour noir intense.
Révélateur impitoyable de toute notre médiocrité complaisante et de nos désirs inavouables.
Une heure quinze de rire, jaune, à sen étrangler.
C'est cinglant, toujours juste et plus encore dérangeant.
On en redemande.
Honte à Lulu de ne pas vous en avoir parlé plus tôt.
On ne fait pas ici dans la confidentialité.
Le spectacle se joue à guichet fermé dans la grande salle Renaud-Barrault.
Les échos se multiplient de toutes parts sur les ondes et dans la presse.
Ma curiosité n'était pas moins dénuée de mes réticences habituelles pour le genre "one man show" d'humoriste trop souvent gras et lourd.
Mais divine surprise notre élégant jeune homme fait dans le politiquement incorrect de rigueur, le transgressif généralisé, la provocation cultivée, l'humour noir intense.
Révélateur impitoyable de toute notre médiocrité complaisante et de nos désirs inavouables.
Une heure quinze de rire, jaune, à sen étrangler.
C'est cinglant, toujours juste et plus encore dérangeant.
On en redemande.
Honte à Lulu de ne pas vous en avoir parlé plus tôt.
L'Homme Inutile de Iouri Olecha mise en scène de Bernard Sobel
Vous ne connaissez pas Youri Olecha?
Rassurez-vous, moi non plu, en dépit de mon attirance pour de nombreux auteurs russes: Boulgakov, Babel, Pilniak, Agnéev et Yakov Braun, ses contemporains.
Voilà tout le talent et le mérite de Daniel Sobel: avoir ressuscité cet écrivain prophétique né à la charnière du XXème siècle, en 1899, et mort en 1960 dans le plus grand dénuement et dans l'oubli parce qu'interdit après avoir connu la notoriété avec ses premiers écrits.
"L'Homme Inutile". Pièce visionnaire qui annonce en 1928 notre époque, avec une lucidité prémonitoire sidérante. "L'Homme Inutile" ou comment sauver l'humanité face à l'implacable règne du matérialisme.
Rien de didactique ici, moins encore de démonstration pédagogique; mais une parabole foutraque mettant en scène deux frères que tout oppose.
L'un respecté et soutenu par les autorités pour son engagement sans réserve dans la recherche du progrès social et la libération de l'homme, inventeur d'une découverte fondamentale: le saucisson à 25 Kopecks pour tous, moyen infaillible pour atteindre le but suprême: l'Avenir Radieux.
L'autre, fol, roi déchu, clochard superbe et ivrogne, est l'incarnation de l'Homme Inutile.
Entre eux deux autre personnages, enjeu du drame qui se noue: une délicieuse jeune fille, objet de toutes les rivalités, et un jeune poète maudit, protégé du savant mais également fou amoureux de la jeune personne.
Tout cela finira mal, tragiquement, par la mort du poète, l'avènement triomphal du saucisson face à l'écrasement du complot des sentiments fomenté par l'autre frère, qui aura tenté par tous les moyens de les faire se soulever dans un ultime soubresaut contre-révolutionnaire.
Certes le spectacle dure deux heures quarante... le texte n'est pas exempt de quelques longueurs et digressions parfois bavardes, mais son essence même, l'idée de l'auteur: la transposition du sujet sur le mode burlesque, en font un spectacle baroque et passionnant. La beauté des décors de Lucio Fanti dans un style entre expressionnisme et modernisme épuré, le jeu étonnant de John Arnold grandiose (Ivan le vagabond) face à Pascal Bongard (Andreï, l'homme nouveau) font aussi oublier quelques erreurs de distribution.
Le spectacle a pris fin le 8 octobre, je vous en ai parlé pour vous donner envie de lire Iouri Olecha
Voilà vraiment un auteur à REdécouvrir:
"Le Livre des Adieux" édition du Rocher 2006
"L'Envie" chez Point Seuil
"Les Trois Gros" à L'Age d'Homme
Rassurez-vous, moi non plu, en dépit de mon attirance pour de nombreux auteurs russes: Boulgakov, Babel, Pilniak, Agnéev et Yakov Braun, ses contemporains.
Voilà tout le talent et le mérite de Daniel Sobel: avoir ressuscité cet écrivain prophétique né à la charnière du XXème siècle, en 1899, et mort en 1960 dans le plus grand dénuement et dans l'oubli parce qu'interdit après avoir connu la notoriété avec ses premiers écrits.
"L'Homme Inutile". Pièce visionnaire qui annonce en 1928 notre époque, avec une lucidité prémonitoire sidérante. "L'Homme Inutile" ou comment sauver l'humanité face à l'implacable règne du matérialisme.
Rien de didactique ici, moins encore de démonstration pédagogique; mais une parabole foutraque mettant en scène deux frères que tout oppose.
L'un respecté et soutenu par les autorités pour son engagement sans réserve dans la recherche du progrès social et la libération de l'homme, inventeur d'une découverte fondamentale: le saucisson à 25 Kopecks pour tous, moyen infaillible pour atteindre le but suprême: l'Avenir Radieux.
L'autre, fol, roi déchu, clochard superbe et ivrogne, est l'incarnation de l'Homme Inutile.
Entre eux deux autre personnages, enjeu du drame qui se noue: une délicieuse jeune fille, objet de toutes les rivalités, et un jeune poète maudit, protégé du savant mais également fou amoureux de la jeune personne.
Tout cela finira mal, tragiquement, par la mort du poète, l'avènement triomphal du saucisson face à l'écrasement du complot des sentiments fomenté par l'autre frère, qui aura tenté par tous les moyens de les faire se soulever dans un ultime soubresaut contre-révolutionnaire.
Certes le spectacle dure deux heures quarante... le texte n'est pas exempt de quelques longueurs et digressions parfois bavardes, mais son essence même, l'idée de l'auteur: la transposition du sujet sur le mode burlesque, en font un spectacle baroque et passionnant. La beauté des décors de Lucio Fanti dans un style entre expressionnisme et modernisme épuré, le jeu étonnant de John Arnold grandiose (Ivan le vagabond) face à Pascal Bongard (Andreï, l'homme nouveau) font aussi oublier quelques erreurs de distribution.
Le spectacle a pris fin le 8 octobre, je vous en ai parlé pour vous donner envie de lire Iouri Olecha
Voilà vraiment un auteur à REdécouvrir:
"Le Livre des Adieux" édition du Rocher 2006
"L'Envie" chez Point Seuil
"Les Trois Gros" à L'Age d'Homme
dimanche 2 octobre 2011
Hollywood de Ron Hutchinson au Théâtre Antoine Mise en Scène Daniel Colas avec Daniel Russo, Thierry Frémont et Samuel Le Bihan
Hollywood - ou comment David O' Selznick s'est cloîtré avec son scénariste (Ben Hecht) et son réalisateur (Victor Flemming) pour réécrire "Autant en Emporte le Vent" après avoir stoppé un début de tournage et congédié toute l'équipe engagée pour le film George Cukor inclus.
Le sujet est alléchant: découvrir les secrets d'une production mythique du cinéma mondial, les exigences "dictatoriales" d'un producteur, les risques financiers colossaux du projet, le tournage d'un récit à la gloire du sud esclavagiste en plein conflit mondial (1942). Autant de thèmes qui pouvaient laisser augurer une soirée prenante.
J'irai droit au but, c'est raté, complètement raté.
Passées les premières minutes pendant lesquelles on ne peut s'empêcher de rire durant la scène burlesque ou Selznik après avoir convoqué son nouveau scénariste à six heures du matin, celui-ci arrivé à jeun, se voit privé de petit déjeuner (alors qu'il salive devant un plateau somptueusement servi) au prétexte que "les sucs digestifs" nuisent à la créativité. Ou lorsque le nouveau réalisateur pressenti est obligé de reconnaître à contre-coeur qu'il a giflé la pauvre Judy Garland pendant le tournage du "Magicien d'Oz".
Dès lors on s'enfonce dans une vulgaire pantalonade qui s'alourdit inexorablement jusqu'à la fin de la représentation.
Nos trois personnages se réduisent à des figures de bouffons se livrant à une série de pitreries et de contorsions aussi éculées que grossièrement jouées, caricaturant sans humour et avec outrance leur propre épuisement physique et moral tout comme les personnages du livre qu'ils sont obligés de jouer.
Particulièrement affligeant le numéro du réalisateur (Le Bihan) transformé en guenon à la suite du régime alimentaire - bananes, cacahuètes - imposé par Selznik, ou les mimiques, grimaces et gesticulations de ce dernier (Daniel Russo) interprétant Scarlett dans la scène finale.
Ni le beau décor, ni les maladroites tentatives de mise en perspective dans le contexte mondial de la contradiction entre cette histoire raciste et le statut de juif émigré du producteur ne sauvent la pièce (ou son adaptation française) d'une accablante médiocrité.
Il existe un public pour ce théâtre.
Moi j'en sors totalement déprimé ne sachant au juste si c'est des spectateurs ou des comédiens dont on se moque aussi délibérément.
Le sujet est alléchant: découvrir les secrets d'une production mythique du cinéma mondial, les exigences "dictatoriales" d'un producteur, les risques financiers colossaux du projet, le tournage d'un récit à la gloire du sud esclavagiste en plein conflit mondial (1942). Autant de thèmes qui pouvaient laisser augurer une soirée prenante.
J'irai droit au but, c'est raté, complètement raté.
Passées les premières minutes pendant lesquelles on ne peut s'empêcher de rire durant la scène burlesque ou Selznik après avoir convoqué son nouveau scénariste à six heures du matin, celui-ci arrivé à jeun, se voit privé de petit déjeuner (alors qu'il salive devant un plateau somptueusement servi) au prétexte que "les sucs digestifs" nuisent à la créativité. Ou lorsque le nouveau réalisateur pressenti est obligé de reconnaître à contre-coeur qu'il a giflé la pauvre Judy Garland pendant le tournage du "Magicien d'Oz".
Dès lors on s'enfonce dans une vulgaire pantalonade qui s'alourdit inexorablement jusqu'à la fin de la représentation.
Nos trois personnages se réduisent à des figures de bouffons se livrant à une série de pitreries et de contorsions aussi éculées que grossièrement jouées, caricaturant sans humour et avec outrance leur propre épuisement physique et moral tout comme les personnages du livre qu'ils sont obligés de jouer.
Particulièrement affligeant le numéro du réalisateur (Le Bihan) transformé en guenon à la suite du régime alimentaire - bananes, cacahuètes - imposé par Selznik, ou les mimiques, grimaces et gesticulations de ce dernier (Daniel Russo) interprétant Scarlett dans la scène finale.
Ni le beau décor, ni les maladroites tentatives de mise en perspective dans le contexte mondial de la contradiction entre cette histoire raciste et le statut de juif émigré du producteur ne sauvent la pièce (ou son adaptation française) d'une accablante médiocrité.
Il existe un public pour ce théâtre.
Moi j'en sors totalement déprimé ne sachant au juste si c'est des spectateurs ou des comédiens dont on se moque aussi délibérément.
Les Bonnes de jean Genet théâtre de l'Atelier avec Prune Beuchat Christine Brücher Lolita Chammah
Genet a écrit sa pièce "Les Bonnes" d'après un fait divers.
Mais ici le dénouement est autre que celui de cet assassinat sordide.
Ce n'est pas la patronne qu'on trucide.
Par un retournement aussi étonnant que tragique, c'est le suicide de l'une des soeurs, meurtrière en puissance, qui clôt cette histoire à la fois dérangeante et sulfureuse.
Texte puissant et transgressif "Les Bonnes" sont la pièce de toutes les équivoques et de l'ambiguïté.
Drame de la misère certes, mais pas de la "lutte des classes". C'est Genet lui-même qui le dit.
Par le jeu du travestissement, au sens propre, de basculements et d'inversions des rôles, les rapports Amour-Haine, Dominant-Dominé, sont superbement rendus par l'écriture incisive, crue, violente de ce grand texte de Genet dont la force dévastatrice requiert de grandes interprètes.
Or ni Prune Beuchat, ni Lolita Chammah, en dépit de leur engagement, n'ont l'envergure de ces rôles. Seule Christine Brücher, en Madame adorablement détestable, a la présence et tout l'éclat de son rôle sur scène.
On le regrette pour Sylvie Busnel qui signe une bonne mise en scène et Jérôme Kaplan dont le superbe décor vénéneux à souhait et les costumes aussi intelligents que spectaculaires servent admirablement la pièce.
Mais ici le dénouement est autre que celui de cet assassinat sordide.
Ce n'est pas la patronne qu'on trucide.
Par un retournement aussi étonnant que tragique, c'est le suicide de l'une des soeurs, meurtrière en puissance, qui clôt cette histoire à la fois dérangeante et sulfureuse.
Texte puissant et transgressif "Les Bonnes" sont la pièce de toutes les équivoques et de l'ambiguïté.
Drame de la misère certes, mais pas de la "lutte des classes". C'est Genet lui-même qui le dit.
Par le jeu du travestissement, au sens propre, de basculements et d'inversions des rôles, les rapports Amour-Haine, Dominant-Dominé, sont superbement rendus par l'écriture incisive, crue, violente de ce grand texte de Genet dont la force dévastatrice requiert de grandes interprètes.
Or ni Prune Beuchat, ni Lolita Chammah, en dépit de leur engagement, n'ont l'envergure de ces rôles. Seule Christine Brücher, en Madame adorablement détestable, a la présence et tout l'éclat de son rôle sur scène.
On le regrette pour Sylvie Busnel qui signe une bonne mise en scène et Jérôme Kaplan dont le superbe décor vénéneux à souhait et les costumes aussi intelligents que spectaculaires servent admirablement la pièce.
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