Cette pièce de François Bégaudeau nous parle de la séparation d'un couple voulu par l'épouse lassée d'une vie conjugale qu'a progressivement rongée la lassitude, la monotonie, l'indifférence et l'usure des ans, et qui, posément, calmement et lucidement, sans patos ni convulsion justifie devant son mari et ses deux grands enfants sa décision de les quitter pour vivre un nouvel amour, riche de tendresse, de désir, de plaisir plutôt que de poursuivre une existence de faux semblants et de laisser échapper cet authentique et nouveau bonheur.
Dans un beau décor sobre et élégant de Damien Caille-Perret, Emanuelle Devos est lumineuse, naturelle. Elle joue son personnage avec une grande authenticité et elle incarne cette femme à la fois sensible et courageuse, avec délicatesse et vulnérabilité. Ce n'est pas le caprice ou l'égoïsme qui la guide, sa décision a été mûrement réfléchie, et elle a conscience des déchirements qu'elle provoque, mais elle est convaincue qu'elle est dans le vrai et s'en explique avec une totale sincérité.
Lui, le mari (Jacques Bonaffé) renfrogné, sa blessure et son amour propre écorné, reste digne mais sait exprimé le choc qui l'atteint de plein fouet.
Et puis les enfants. Voilà le plus rare et réussi de la pièce de Bégaudeau. Sa connaissance étonnante, profonde de l'adolescence. Pas une réplique, pas un échange, dont chaque mot ne résonne avec une justesse admirable, une pertinence totale. Les deux jeunes comédiens sont eux aussi étonnants. L'aîné (Alexandre Lecroc) possessif et plus agressif envers sa mère, allant jusqu'à la provoquer sur le sujet du sexe; la cadette (Anaïs Demoustier) mignonne, est totalement bouleversante quand après avoir longuement gardé le silence et feint l'indifférence, finit par déclarer à sa mère qu'elle ne souhaite que son bonheur. On est submergé d'émotion. Une petite phrase lachée dans la tempête, et c'est toute la douceur de l'amour familial que sait faire resurgir la très jeune et talentueuse comédienne.
La mère peut enfin partir et quitter sa famille dans une "paix" quasiment retrouvée et le spectateur, la salle, après avoir vécu avec les interprètes une situation si commune de nos jours mais jamais banale ni innocente.
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