Pour tout hispanophile de base,assister à une représentation de"La Célestine",oeuvre emblématique de la littérature du début du Siècle d'OR(1499) et de la peinture espagnoles(Picasso de la période "bleue"), ne se manque sous aucun prétexte.La Presse s'en est fait unanimement l'écho: ne pas se rendre à Nanterre eût été une "faute" aux yeux de certains.
Pendant les trois heures trente de spectacle,Christian Schiaretti nous donne à voir, conformément à ses déclarations,une mise en scène complètement imprégnée de l'Ecole du T.N.P. de Chaillot:
Décor réduit à un unique praticable central,sur lequel s'ouvrent à chaque extrémité des portes rouge-sang(semblables à celles d'un tauril), costumes éblouissants pour les acteurs,et lumières seules définissant lieux et climats de l'action.
Le texte de Rojas se reçoit pleinement d'un bout à l'autre de la représentation,c'est un brûlot:sa force de subversion, son érotisme exacerbé,sa dénonciation du clergé,sa peinture de la bassesse, de la cupidité et de la luxure des hommes sont non seulement impensables dans le contexte de l'époque, mais conservent toute leur force de transgression intacte aujourd'hui. C 'est éblouissant , en le découvrant sur scène on comprend qu'il soit considéré comme fondateur du théatre moderne.
Mais... il y a un mais, quitte à déplaire: Jean Vilar reste incomparable, inégalé dans sa conception théatrale, et si les jeunes comédiens de Lyon sont tous beaux et justes, si Hélène Vincent se donne sans réserves à la Célestine, il manque à ce spectacle le "Souffle" T.N.P.On ne peut s'empêcher, là encore, d'évoquer les "Grands Ainés" Maria Casarès pour ne citer qu'elle, et cette jeunesse mûe par le désir et le souci de libération manque aussi cruellement de chair.
Il faut cependant reconnaître à Christian Schiaretti le grand mérite de nous donner à voir ce que l'on ne voit jamais.C'est déjà tout à fait louable: l'ignorance de ces auteurs sur nos scènes est injustifiable.
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